Une arrivée en douceur : Fort-de-France et les premiers frissons créoles
Il y a cette odeur, au sortir de l’avion à Fort-de-France. Elle est lourde, moite, sucrée. Un mélange de sel, de fleurs et de rhum. La Martinique vous accueille d’abord avec ses parfums. Et très vite, elle vous chuchote une chose à l’oreille : ici, on ne court pas, on savoure.
Pour bien commencer un itinéraire de 10 jours, posez vos valises au cœur de Fort-de-France ou dans les hauteurs verdoyantes de Schoelcher. Flânez dans le marché couvert où les étals explosent de mangues juteuses, d’épices aux noms chantants — colombo, bois d’Inde — et de punchs multicolores. Faites une halte à la bibliothèque Schœlcher, joyau architectural à la façade aussi exubérante que la musique zouk qui s’échappe des radios locales.
Promenez-vous ensuite sur le front de mer et laissez-vous tenter par une balade en bateau pour admirer la baie de Fort-de-France, classée parmi les plus belles du monde. Et si vous êtes d’humeur contemplative, grimpez au jardin de Balata : entre passerelles suspendues et forêt tropicale, le cœur bat différemment.
Cap à l’ouest : plages de rêve et villages de pêcheurs
Le deuxième jour, dirigez-vous vers la côte caraïbe, plus douce, plus tranquille. Arrêtez-vous au village des Anses-d’Arlet, carte postale vivante avec ses cases pastel et son église pittoresque qui s’ouvre directement sur la mer. Le sable y est fin et l’eau d’un calme divin. Ici, pas besoin de palme pour faire de belles rencontres sous-marines : les tortues aiment ce coin tranquille autant que nous.
Continuez jusqu’à la Grande Anse, où le coucher du soleil fait danser les silhouettes des cocotiers. Et pourquoi ne pas passer la nuit dans un petit bungalow en bois, bercé par le chant des grenouilles ? Ce moment où l’on décroche du monde — et de son téléphone — est précieux.
Le diamant brut : entre légende et panoramas volcaniques
Troisième arrêt incontournable : Le Diamant et son célèbre rocher, planté tel un vaisseau de pierre au large. Prenez le temps de faire la randonnée du morne Larcher. Elle grimpe, oui, mais quelle récompense là-haut : la vue plonge sur l’océan, le rocher, la pureté brute.
Non loin de là, visitez la Maison du Bagnard, humble cabanon coloré construit par un ancien bagnard devenu artiste. On y sent une âme, une histoire. Ces petits riens racontent souvent plus que les musées les plus grands.
Sur les hauteurs de la montagne Pelée : un souffle de liberté
Impossible de passer à côté de la Montagne Pelée. Elle veille sur l’île comme une mère sauvage. Dans la fraîcheur matinale, empruntez l’un des sentiers balisés — celui d’Aileron par exemple — pour une ascension au cœur des nuages.
Là-haut, tout change : la lumière, le silence, la façon dont l’air caresse votre peau. On marche, on doute, on s’élève. Le voyage se fait méditation. Et depuis les hauteurs, tout prend un autre sens : la mer devient une toile, les villes des ponctuations.
En redescendant, faites une halte à Saint-Pierre, l’ancienne capitale de l’île, figée dans les cendres depuis l’éruption dévastatrice de 1902. Le théâtre, les ruines… Ici, l’Histoire n’est jamais bien loin.
Cap nord : forêt tropicale et chutes d’eau secrètes
Changeons de décor. Le nord est un appel à la verdure. À Ajoupa-Bouillon, baladez-vous sur le sentier des Gorges de la Falaise — un chemin enchanteur, ponctué de cascades chantantes et de vasques naturelles où l’on plonge avec gratitude.
Faites un détour par la route de la Trace, passage sinueux entre fougères géantes et fougères arborescentes. Les singes hurleurs ne sont pas loin, ou du moins c’est ce que laisse croire le cri du vent dans les feuillages.
Envie d’un arrêt gourmand ? Essayez la distillerie JM à Macouba. Ils vous parleront du rhum comme d’un art sacré, entre alambics centenaires et barriques en chêne. Et la dégustation qui suit vous laissera rêveur, mais toujours sur pied… ou presque.
Jours de repos et d’éveil sensoriel à Sainte-Anne
À mi-parcours, le voyageur a besoin de lenteur. Direction le sud, vers Sainte-Anne et ses plages de carte postale. La plage des Salines ne déçoit jamais : sable blanc, cocotiers penchés comme dessinés par un enfant et eau cristalline. Oui, elle est populaire, mais encore plus belle si vous la découvrez à l’aube ou au coucher du soleil.
Pour une pause hors des sentiers battus, partez tôt le matin pour une marche le long du sentier du littoral, entre la Savane des Pétrifications et l’anse Trabaud. Les paysages y sont lunaires, presque arides, en contraste saisissant avec le reste de l’île.
Et pour les papilles ? Ne passez pas à côté d’un accra bien croustillant, de dombrés aux ouassous (ces crevettes locales) ou du mythique colombo de cabri. Mangez dans une lolo en bord de route, là où ça sent bon la vrai cuisine de maison. Ici, on se régale avec les doigts et le cœur.
Culture et traditions à visiter et à vivre
À trois jours de la fin, plongez dans la richesse culturelle martiniquaise. À Trois-Îlets, visitez la Maison de la Canne et la Savane des Esclaves : deux lieux pour comprendre l’histoire et les racines profondes de l’île. Des récits poignants, parfois douloureux, mais nécessaires pour saisir la force d’une identité métissée.
En soirée, prenez part à une soirée bèlè, cette danse traditionnelle portée par les tambours et les chants créoles. On y tape du pied, on tourne, on chante. Même en spectateur, on se laisse emporter dans ce tourbillon d’émotion.
Cap au large : escapade sur l’îlet Chevalier
Et si on prenait le large ? Depuis le Vauclin ou Sainte-Anne, des embarcations légères vous mènent vers les îlets du François ou de Sainte-Anne. Mon préféré : l’îlet Chevalier. C’est un joyau turquoise, préservé, baigné de silence. Prévoyez masque et tuba : les récifs y sont comme un jardin secret.
Emportez un pique-nique, une grande nappe et un bon livre. L’après-midi y glisse entre siestes à l’ombre, baignades paresseuses et éclats de rires. Parfois, le voyage tient à peu de choses : une eau tiède, un ciel parfaitement bleu, et le temps qui s’arrête sans prévenir.
Derniers instants au marché, entre souvenirs à emporter et regards laissés
Le dernier jour, repassez par Fort-de-France ou faites un saut à Rivière-Salée. Les marchés locaux fourmillent de trésors : rhum arrangé, confitures de goyave, tissus madras, petits colliers faits main. Offrez quelque chose à vos proches, mais offrez-vous surtout un souvenir à garder contre le cœur.
Avant de repartir, trouvez un moment pour longer la côte une dernière fois, en voiture ou à pied, en silence ou en musique. Fermez les yeux un instant : la Martinique s’imprime autrement. Pas seulement dans le regard, mais dans l’âme.
Vous la quittez, oui. Mais elle, elle reste un peu en vous — avec le goût du sucre roux sur les lèvres, le souffle des volcans en tête, et cette mélodie nue du bèlè qui vous fera danser encore, bien après le retour.
Conseils pratiques pour un séjour réussi
- Quand partir ? Préférez la saison sèche entre décembre et avril pour profiter de journées ensoleillées et de températures agréables.
- Location de voiture : indispensable pour explorer l’île de manière autonome. Les routes sont parfois sinueuses : prudence dans les hauteurs.
- Monnaie & budget : l’euro est la monnaie locale. Prévoyez un budget médian, les hébergements varient du gîte familial à l’écolodge raffiné.
- Respect des lieux : la Martinique est riche d’une culture créole vibrante. Un sourire, un bonjour en créole (« Bonjou ») ouvrent bien des portes.
- Santé : pas de vaccin obligatoire, mais n’oubliez pas l’anti-moustique et une bonne protection solaire.
La Martinique ne se visite pas, elle se vit. En 10 jours, on effleure sa beauté, on goûte à son rythme, on se laisse emporter. Et l’on comprend, sur cette île généreuse, que parfois le plus grand luxe, c’est le temps donné aux choses simples. Alors chaussez vos sandales, ouvrez les bras et le cœur : une île vous attend.


