Cachée dans une anse du sud de la Sardaigne, baignée de soleil et d’histoire, Cagliari — ou « Calgary » pour ceux qui confondent parfois avec la ville canadienne — est une petite perle encore trop méconnue des voyageurs. Ce joyau méditerranéen a le goût du sel, de l’huile d’olive et du canonau, et offre à quiconque s’y arrête une échappée douce et authentique, tissée de ruelles en pente, de plages sauvages et de traditions profondément enracinées.
Loin du tumulte touristique des grandes capitales européennes, cette ville à taille humaine séduit par son charme discret et son atmosphère chaleureuse. Et si vous vous demandez ce qu’il y a à voir (et à vivre) dans cette destination encore méconnue, suivez-moi : je vous embarque dans un itinéraire qui sent bon la mer et les pierres chaudes du passé.
Flâner dans le quartier historique de Castello
Perché comme un vieux sage sur la colline qui surplombe la ville, le quartier de Castello est une invitation à remonter le temps. Ici, les ruelles pavées serpentent entre de hauts murs ocre, parfois écroulés juste ce qu’il faut pour laisser apparaître un pan de ciel azur. Fermez les yeux et écoutez : un clapotis de vaisselle, des bavardages en sarde, et le frémissement d’un linge qui sèche à la fenêtre.
Ce quartier a longtemps été le cœur fortifié de la ville, abritant noblesse et clergé, mais il a su garder jusqu’à aujourd’hui une âme vibrante. Ne manquez pas :
- La Cathédrale Santa Maria, et son intérieur baroque qui surprend autant qu’il émerveille.
- Les tours pisanes de San Pancrazio et de l’Elefante, dont les vues offrent un panorama saisissant sur les toits rouges plongeant vers la mer.
- Les souterrains du Bastione di Saint Remy, lieux d’expositions temporaires, mais surtout point de vue incontournable pour un coucher de soleil aux teintes dorées.
Prévoyez de bonnes chaussures : ici, le temps se mesure en escaliers.
L’appel de la mer : plages et lagunes
Que serait Cagliari sans sa mer généreuse ? Si certains coins de la Méditerranée s’arrachent à prix d’or, ici, les plus belles plages sont… en accès libre. Rien de plus simple que d’attraper le bus numéro 5 pour rejoindre la plage du Poetto, longue langue de sable blanc bordée d’un côté par l’eau cristalline, de l’autre par les étangs salins de Molentargius, refuge des flamants roses.
Ce contraste presque irréel — entre ville, mer et nature — donne à Cagliari un air de bout du monde accessible. Posez votre serviette, fermez les yeux, laissez le chant du vent et le cri des goélands faire le reste. Si vous cherchez une expérience un peu plus sauvage, dirigez-vous vers :
- La plage de Calamosca, petite crique encaissée au pied des falaises, parfaite pour échapper aux foules.
- La Sella del Diavolo : une randonnée facile vous y mènera, et de là-haut, la mer semble s’étirer jusqu’au bout du monde.
N’oubliez pas votre maillot… ni votre appareil photo.
Une cuisine qui raconte son territoire
En Sardaigne, on dit que le pain a l’odeur des mains qui le façonnent. À Cagliari, la gastronomie tient autant de la tradition que de l’acte d’amour. Les produits sont simples, relevés d’herbes locales et sublimés par la fraîcheur inégalée des marchés.
Faites un tour tôt le matin au Mercato di San Benedetto, l’un des plus grands marchés couverts d’Italie : c’est un spectacle tant olfactif que visuel. Poissons étincelants, fromages au lait de brebis, piles d’olives, fruits du sud… on en oublierait presque de manger tant on a plaisir à regarder.
Voici quelques incontournables à goûter absolument :
- Le porceddu : cochon de lait rôti lentement à la broche, un plat de fête aux saveurs profondes (souvent servi dans les trattorias de l’arrière-pays).
- Les malloreddus : petites pâtes en forme de coquillage, souvent accompagnées d’une sauce tomate relevée au pecorino.
- Le pane carasau, une feuille de pain croustillante, idéale pour accompagner un antipasto de charcuterie locale.
- Et bien sûr, un verre de Canonau, vin rouge à la robe sombre, au goût puissant de maquis et de soleil.
Manger à Cagliari, c’est toujours un peu partager la table d’un ami. N’hésitez pas à entamer la conversation, même en quelques mots : ici, la chaleur humaine est l’ingrédient principal.
Traditions sardes et artisanat du cœur
Chaque région d’Italie a ses propres rites. En Sardaigne, la tradition n’est pas figée dans les musées. Elle danse encore dans les rues, lors des processions religieuses, vibre dans les tissus brodés, et s’entend dans les polyphonies profondes que les anciens aiment entonner dans les fêtes de village.
À Cagliari, de nombreuses boutiques artisanales perpétuent ce patrimoine vivant :
- Bijoux filigranés inspirés des symboles pré-nuragiques
- Céramiques peintes à la main avec des motifs floraux typiques
- Tissus et tapis, les “a pibiones”, une technique de tissage traditionnelle qui donne ce petit relief si particulier à la surface
Prenez le temps d’observer les mains qui travaillent, interrogez les artisans sur leurs savoir-faire : vous repartirez bien plus riche qu’avec un simple souvenir.
Une ville vivante, entre modernité et douceur de vivre
Cagliari n’est pas qu’un musée à ciel ouvert. C’est aussi une ville qui vit, qui évolue, et qui rebondit entre art contemporain, musique en plein air et cafés animés dès le matin.
Le soir venu, perdez-vous dans les quartiers de Stampace ou Marina : ces anciens lieux modestes regorgent de bonnes adresses. Petits bars à vin où l’on grignote des olives en terrasse, galeries improvisées, librairies avec vue sur mer… Le tout avec cette dolce lentezza typiquement italienne qui fait qu’on oublie de regarder sa montre.
Si vous êtes là au bon moment, explorez le calendrier :
- La Festa di Sant’Efisio (1er au 4 mai) : une grande procession aux costumes multicolores qui relie Cagliari jusqu’à Nora. Émouvante et profondément enracinée.
- Les Notti dei Musei : certains soirs d’été, les musées ouvrent en nocturne avec des concerts, des lectures, une atmosphère magique.
Et si vous aimez vous laisser porter, sans carte ni plan, asseyez-vous sur une placette, commandez un café, observez la vie autour de vous. Parfois, c’est là que le voyage commence vraiment.
Infos pratiques pour une escapade réussie
Si Cagliari reste encore en dehors des grands circuits touristiques, elle est pourtant très accessible :
- Comment s’y rendre : L’aéroport de Cagliari-Elmas est desservi par de nombreux vols low-cost depuis la France (notamment Paris et Marseille), particulièrement en été.
- Se déplacer : Le centre-ville se parcourt très facilement à pied. Quelques bus suffisent pour accéder aux plages ou aux quartiers en périphérie.
- Quand visiter : Le printemps (avril-mai) et l’automne (fin septembre-octobre) sont parfaits : douceur, faible affluence, paysages en fleurs ou dorés par la lumière rasante.
- Combien de temps rester : Trois à quatre jours permettent de bien explorer la ville, ses alentours naturels et d’embrasser son atmosphère.
Et surtout, ne partez pas sans goûter à cette sensation un peu étrange mais délicieuse : celle de se sentir chez soi, dans une ville que l’on découvre pour la toute première fois.
À Cagliari, il n’y a pas de monuments « must-see » criant leur importance : ce sont les détails, les silences, les parfums dans l’air qui écrivent le plus beau des carnets de voyage.
Et si vous fermez les yeux, je suis certaine que vous entendrez, quelque part en fond, le chant des flamants et le murmure d’un vent chaud… prêt à vous raconter la suite.